Que représente le logo de Yoga Bhoga ?

Le logo Yoga Bhoga représente un personnage, Patañjali, dont nous ne savons pas grand-chose et dont l’historicité même est douteuse, pour Michel Angot, sanskritiste et indianiste. Patañjali est l’auteur du Yoga sūtra, un recueil de 195 aphorismes sur le yoga, considéré comme le texte le plus important sur le yoga.


Comme on sait peu de choses sur lui, des légendes courent à son sujet et son origine est d’abord « mythique » : la légende raconte que, dans les temps anciens, les hommes vivaient en proie à la douleur et à la confusion, dans un grand désordre, sur le plan social et individuel ; les hommes n’étaient pas en paix, ils étaient faibles dans leurs corps, ne communiquaient pas efficacement entre eux. Leur langage non structuré et ambigu favorisait les malentendus et les conflits, ce qui ne faisait qu’accroître la souffrance. Ils ne sortaient pas de ce cercle de souffrance. Quelques sages cependant (appelés ṛṣi, prononcez « rishi », au sens littéral « voyants »), animés par un esprit de solidarité, invoquèrent une force supérieure. Le dieu Viṣṇu leur envoya son serpent, Ananta, le cobra à mille têtes, dépositaire de la sagesse infinie, qui tomba dans les mains tendues des sages, absorbés dans leur méditation : Patañjali, de pat « celui est qui tombé sur » et añjali « les mains tendues en forme de coupe », littéralement, « celui qui est tombé dans les mains orientées vers le haut ». Patañjali commença à enseigner la voie qui mène hors de la souffrance, et notamment des trois maux : la confusion mentale, la maladie physique, les problèmes de communication. 

Il est représenté sous une forme mi-homme mi-serpent, souvent les mains en añjali avec un chapelet. Son visage humain est serein, ses yeux semblent clos ou mi-clos, il repose sur la moitié serpentine de son corps, cinq têtes de nāga se dressent au-dessus de sa tête (comme vous pouvez le voir sur la photo ci-dessous, prise au Krishnamacharya Yoga Mandiram ou KYM, en février 2020).

statue de Patanjali
Chennai, KYM, février 2020

L’expérience du yoga se réfère à une tradition ancienne accrochée au nom de ce maître des temps anciens, Patañjali, qui s’est exprimée dans un petit livre toujours en usage, traduit dans de nombreuses langues, le Yoga sūtra. Le mot sūtra désigne le fil d’un collier, donc un fil conducteur entre les données reçues de la tradition. C’est dans ce traité que sont « codifiés » les fondements pratiques et philosophiques du yoga. Il date d’environ 2000 ans. Il est attribué à Patañjali, mais rien n’est moins sûr… on ne sait pas si ce Patañjali désigne une personne en particulier ou un groupe de personnes. Comme le rappelle Michel Alibert, « si l’on essaie de voir les choses historiquement, il semble qu’il y ait eu à un moment donné une sorte de convergence entre divers courants qui ont fini par s’agréger, par s’harmoniser et qui ont abouti à une certaine cohérence. L’un d’eux aurait opéré cette synthèse et un individu nommé Patañjali a accroché son nom à l’opération. Mais certainement ce travail fut la réception d’une tradition très antérieure » (Yoga et christianisme, 2023). À Patañjali on attribue aussi un traité de médecine (pour prendre soin du corps) et un traité de grammaire (pour mieux communiquer), mais les indianistes s’accordent sur le fait que ce ne sont pas les mêmes personnes).


Patañjali est surtout vénéré en Inde du Sud. Un mantra d’invocation lui est dédié, qui est souvent chanté avant les enseignements :

yogena cittasya padena vācāṃ malaṃ śarīrasya ca vaidyakena
yo’pākarottaṃ pravaraṃ munīnāṃ patañjaliṃ prāñjalirānato’smi

Je m’incline devant le plus noble des sages, Patañjali
qui apporta la sérénité de l’esprit par son œuvre sur le yoga ;
la clarté du discours par son œuvre sur la grammaire ;
et la pureté du corps par son œuvre sur la médecine ;
Je salue Patañjali, le meilleur des sages.